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Grande fête que l’Ascension ! Pensons à la joie des anges. Ils voient revenir leur Créateur drôlement accoutré avec cette nature humaine qu’il porte sur ses épaules. Le Fils de Dieu est le Bon Pasteur qui ramène devant les 99 brebis, c’est-à-dire devant les neuf chœurs angéliques, la petite brebis humanité qui s’était égarée dans les bas-fonds. « Quand je serai élevé de terre j’attirerai tout à moi » (Jn 12,32).

 

Élevé sur la croix ou élevé dans la gloire du ciel, c’est tout un car pour saint Jean la Passion, Pâques, l’Ascension et même la Pentecôte sont un seul et même mystère. J’attirerai tout à moi, non seulement tous les hommes, mais surtout tout l’homme. Ce n’est pas simplement l’âme humaine ou l’esprit humain ou je ne sais quelle partie éthérée de l’humanité qui est destinée à monter au ciel avec le Christ, mais c’est bien l’homme tout entier.

 

Le corps humain aussi est appelé à être glorifié. C’est bien ce que nous fêtons au jour de l’Ascension, l’humanité assumée par le Verbe entre au ciel et cette humanité est complète, corps et âme.

 

 

 

Il est monté

Après être descendu aux enfers le Christ monte aux cieux. « Il est monté, qu’est-ce à dire, sinon qu’il est aussi descendu dans les régions inférieures de la terre ? Et celui qui est descendu, c’est le même qui est aussi monté au-dessus de tous les cieux, afin de remplir toutes choses » (Ep 4,9-10). C’est parce qu’il est sorti du Père que le Christ peut retourner au Père. « Personne, en effet, n’est jamais monté aux cieux sinon celui qui est descendu des cieux » (Jn 3,3)

 

L’Ascension, c’est le Noël du ciel. Noël : Le Verbe se fait chair, il habite notre terre. Ascension : Notre chair pénètre dans les cieux, l’homme habite en Dieu. Notre mère, la poussière de la terre, entre au ciel ! Jésus monte au ciel. Certes, l’Écriture n’est dupe de cette imagerie locale. Nul n’est assez sot pour s’imaginer que Dieu réside localement dans le ciel. « Voici que les cieux et les cieux des cieux ne le peuvent contenir ! », s’écrie émerveillé le roi Salomon (1 Rois 8,27 ; 2 Ch 2,5 et 6,18).

 

Pourtant « les cieux racontent la gloire de Dieu », par son immensité sa beauté, sa paix, l’azur dit quelque chose de Dieu, au point que les mots « Dieu » et « Ciel » sont devenus parfaitement synonymes. Monter au ciel s’est donc retourner chez Dieu. Jésus Ressuscité avait dit à Marie-Madeleine : « Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Mais va trouver mes frères et dis-leur : je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu » (Jn 20,17)

 

Désormais ce n’est plus par les sens mais par la foi qu’on appréhende le Seigneur. Seule la foi « touche au ciel » si l’on peut dire. Ces simples paroles « je monte vers mon Père et votre Père » récapitulent tout le dessein du salut explique Saint Grégoire de Nysse. Il s’agit de restituer au Père l’humanité prodigue, qui comme le Fils de la Parabole a dilapidé l’héritage dans la région de la dissemblance (cf. Luc 15)

 

Le Nouveau Testament témoigne que durant quarante jours le Christ Ressuscité s’est montré aux siens, son caractère glorieux demeurant cependant encore voilé sous les traits divers dont il se drape. Le quarantième jour après Pâques « il fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu » (Mc 16,19).

 

Voici comment le livre des Actes rapporte l’Ascension du Seigneur : « A ces mots, sous leurs regards, il s’éleva, et une nuée le déroba à leurs yeux. Et comme ils étaient là, les yeux fixés au ciel pendant qu’il s’en allait, voici que deux hommes vêtus de blanc se trouvèrent à leurs côtés ; ils leur dirent : Hommes » de Galilée, pourquoi restez-vous ainsi à regarder le ciel ? Celui qui vous a été enlevé, ce même Jésus, viendra comme cela, de la même manière dont vous l’avez vu s’en aller vers le ciel. »(Actes, 1,9-11)

 

 

 

Emporté par la nuée

Comme Enoch ou Elie avant lui Jésus a été enlevé, une nuée l’a dérobé au regard des siens. Cette nuée est le symbole de la gloire divine et le passif « a été enlevé » est une manière de signifier que Dieu est l’auteur de l’action.

Pourtant il est dit aussi que Jésus s’éleva. Cette fois le verbe est à l’actif car en tant qu’il est Dieu Jésus s’élève par sa propre puissance. Comme le Christ l’avait annoncé : « Je suis sorti d’auprès du Père et venu dans le monde. De nouveau je quitte le monde et je vais vers le Père. » (Jn 16,28)

 

Eli avait été enlevé sur un char de feu. Ce char de la gloire divine Ezéchiel l’avait vu avec ses roues à quatre faces : homme, taureau, lion, aigle. Or le Christ est ce char lui-même. Il est homme par son Incarnation ; il est taureau par son sacrifice ; il est lion par sa Résurrection, le lion de Juda ayant vaincu la mort ; il est aigle par son Ascension dans le ciel. Comme Elisée s’était vu promettre une double part de l’esprit d’Elie s’il contemplait son maître pendant qu’il s’élevait (2 R 2,9-10) ainsi les disciples « fixent le ciel pendant que Jésus s’en va » pour recevoir l’Esprit que Jésus leur a promis.

 

De même que le Fils de Dieu en quittant le Père pour entrer dans ce monde n’avait pas abandonné le Père, de même en quittant ce monde pour rejoindre le Père il n’abandonne pas le monde. Il a promis de ne pas laisser les siens orphelins et de leur donner son Esprit. Il demeurera toujours l’Emmanuel, Dieu avec nous, c’est pourquoi au moment même de son départ il peut dire « Et moi je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ». (Mt 28,20).

 

 

Père Guillaume de Menthière (Extrait du MOOC « Jésus, l’incomparable », du collège des Bernardins)

 

 

 

Source : Croire.com